• La fin de l'hiver est un moment exceptionnel dans le Grand Nord: les journées rallongent et les sorties en raquettes ou pour la pêche sur le lac gelé se multiplient.

    Autant d'occasions pour rencontrer des copains, surtout lorsque les avalanches bloquent le col et qu'il faut attendre quelques heures dans le seul lieu public à 300 km à la ronde: la station service de Meziadin Junction, avec son coffee shop et son snack. Car "l'avalanche team" surveille la montagne en hélicoptère, toujours prêt à dynamiter un manteau neigeux déjà fragilisé par le soleil du printemps.

    C'est là que j'ai appris ce qu'est la solidarité entre gens du Nord: ici le café (américain...) est gratuit pendant l'attente, l'équipe de déneigement prévient par VHF une fois la route dégagée et c'est en convoi qu'on s'engage dans le Bear Pass.

    Dans l'intervalle vous apprenez les dernières nouvelles de la saison de trappe, les conditions routières, les ventes ou échanges de pièces de rechange pour moto-neige ou tronçonneuse, bref tout ce qui fait la vie de ces hommes hors du commun, hors du temps.

    Comme dirait mon ami JOE, on trouve ici deux types d'individus: ceux qui sont nés ici et qui ont façonné le territoire. Et ceux qui ont fuit quelque chose, parfois simplement la vie stressante des grandes villes (des réfugiés écologiques?), parfois un passé chargé qu'ils aimeraient oublier ici.

    C'est ainsi qu'un homme (on l'appelera BOB) est arrivé seul un jour, pour construire sa cabane dans le bush, sur un terrain loué à la province en retrait du highway. La forêt à l'entour lui offre le bois pour la construction et le chauffage, une rivière traverse le lieu et lui fournit une eau exceptionnelle ainsi que l'électricité à travers une turbine.

    Plutôt taciturne, BOB ne cultive pas le contact. Mais n'était-il justement venu ici pour être tranquille? Bien sûr un trappeur s'arrête parfois pour prendre des nouvelles ou lui demander un peu de carburant en dépannage, ou un officier de la RCMP (Royal Canadian Mounty Police) enquêtant sur une affaire de braconnage d'ours vient lui demander quelque tuyau.

    C'est donc lors d'une de ces après-midi où, bloqué à la station de Mez (Meziadin Junction), mon ami GERRY voit arriver un officier de la RCMP complètement défait, pâle, secouant la tête et répetant invariablement: "je ne peux rien pour lui, il faut que j'attende le dégel".

    Mon ami GERRY est un personnage attachant,  toujours prêt à rendre service  du haut de ses 1,90m et ses 140 kilos. Venu de Terre Neuve voilà 30 ans, il a trouvé sa place ici. Car la côte Atlantique des années 70 a vu le déclin de la pêche à la morue, tandis que la côte Pacifique offrait toujours des opportunités dans les mines d'or! Qu'à cela ne tienne: GERRY sera mineur. Une vie rude, dans les camps d'altitude, travaillant par cycles de quatre semaines en continu suivi d'une ou deux semaines de repos. Mais enfin la mine, cela paye bien, permet d'offrir une vie confortable à sa famille et de faire pas mal d'économies pour la retraite.

    GERRY va donc parler à l'officier pour apprendre que BOB est décédé tragiquement, happé et assommé par la roue de la turbine, puis inexorablement transformé en un bloc de glace par l'eau accumulée et gelée. Bien que très touché par la triste nouvelle, GERRY ne peut se résoudre à laisser le corps de BOB là-haut, car son éducation chrétienne Terre-Neuvoise et sa conscience lui demandent d'agir, et vite.

    Sans attendre que la RCMP termine son rapport, le voilà au volan de son pick-up Ford, toujours équipé d'une tronçonneuse, de quelques jerricans d'essence et d'un fusil, au cas où...

    GERRY s'engage sur le Highway 37 enneigé en direction du Nord et accélère malgré des conditions météo excécrables: bourrasques de neige, vent fort, mais heureusement pas de risque d'avalanche car ici les montagnes ont pris un peu de distance avec le highway.

    Il a deux bonnes raisons de se dépêcher: en février les journées sont courtes et la nuit tombe tôt, et surtout nous somme le jour de son anniversaire et des amis doivent le rejoindre ce soir pour une petite "party" dans sa maison.

    Quand je dis maison, je ne peux me retenir de vous raconter cette anectode: le jour où j'ai fait la connaissance de GERRY voilà trois ans, il m'a invité chez lui et fait visiter sa demeure qui n'est rien d'autre que...l'ancien commissariat de la RCMP, avec cellule à barreaux au rez-de-chaussée! Et que croyez-vous que j'ai trouvé dans la cellule? Non pas un "prisonnier" oublié au moment de la vente du commissariat, non, simplement un magnifique loup...empaillé!

    Mais revenons sur le Highway. Bientôt GERRY atteindra la cabane de BOB, mais la neige l'oblige à faire les derniers cinquantes mètres à pieds, ce qui nous verrons, n'est pas sans poser problème. Il se dirige donc vers l'entrée de la cabane, mal refermée par le policier

    à suivre...

     

     

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  • La COLOMBIE BRITANNIQUE, une des provinces de l'ouest canadien, a un accès direct vers l'Océan Pacifique. En effet, nombre de rivières et fleuves quittent le versant ouest des Rockies pour se jeter dans le Golfe d'Alaska.

    Ce sont ces routes qui sont empruntées par les SAUMONS pour entreprendre leur grande MIGRATION.

    5 espèces de saumons sont régulièrement présentes dans les eaux de la SKEENA et de la NASS RIVER, dans le Nord de la province, là où Colombie Britannique et Alaska se rencontrent.

    Du plus petit au plus grand: le PINK, le SOCKEYE, le COHO (ou Silver), le CHUM (ou Dog) et le CHINOOK (ou Spring), qu'ils soient argentés ou rouge écarlate comme le sockeye en parure nuptiale, ils ont tous la même motivation, se reproduire.

    Nés dans un torrent de montagne, le petit SMOLT démarre sa vie en tirant sa nourriture d'un "petit sac de voyage" dont il est doté au moment de l'éclosion de l'oeuf. Ces oeufs que sa mère a  pondu par milliers (4000) et que son père a fécondé en luttant contre ses concurrents, mais dont seuls quelques uns donneront naissance à un alevin.

    Car aussitôt pondus dans un "nid" de gravier, d'autres femelles déterrent les oeufs pour pondre à leur tour, les harles et les canards arboricoles viennent se régaler, et enfin les oursons sont attirés par leur belle couleur orange: la compétition démarre avant même que le smolt ne voit le jour.

    C'est là que j'ai pu observer cette lutte pour la vie: alimenté par les eaux froides du SALMON GLACIER, FISH CREEK rejoint le PORTLAND CANAL, un fjord qui donne accès au Pacifique. 

    Suite dans quelques jours...   

     

     


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  • TCHERNOBYL, 20 ANS APRES...

    20 ANS! C'est le temps écoulé depuis la catastrophe de la centrale nucléaire de TCHERNOBYL, le temps qu'il aura fallut pour admettre l'inadmissible: le nucléaire tue! Des milliers de morts (100 000?) suite à cette catastrophe prévisible, mais surtout des centaines de milliers de personnes malades à travers l'Europe et pas seulement en Ukraine!

    Car un "nuage nucléaire" se moque des frontières et aujourd'hui toute la planète à des degrés divers est touchée par ce cancer. Les hommes qui se sont investits dans le nettoyage de la centrale nucléaire de TCHERNOBYL sont soit morts, soit en sursis, les populations sont gravements malades, en vrac: cancer du sang (leucémie), ulcères d'estomac, irritation chronique du système digestif, troubles nerveux (Alzheimer), malformation des nouveaux-nés (enfants sans bras, sans jambes)...

    Et pour tous, un vieillissement prématuré: des personnes de 30 ans présentent souvent des troubles physiques et psychiques qui n'apparaîssent habituellement qu'après l'âge de 70 ans!

    Le manque d'informations conduit les Ukrainiens à consommer des aliments produits sur des terres polluées et ils continuent ainsi à aggraver leur état de santé déjà fragilisé.

    La communauté internationale détourne le regard et lorsque des associations à but humanitaire viennent en aide leur action est souvent rendue difficile par des autorités locales tatillonnes, et aussi par l'administration française qui veut imposer ses propres règles.

    20 ANS! Qu'avons-nous fait en France depuis? Nous poursuivons le développement de nos centrales nucléaires, nous projetons d'en construire d'autres, lorsque l'Allemagne décide de fermer les siennes. Et s'empresse d'acheter l'énergie manquante à la France et nous envoie ses déchets nucléaires pour le retraiter (les fameux transports CASTOR, il fallait oser les appeler ainsi)! France, championne du monde du nucléaire et poubelle mondiale du nucléaire?

    Oui, tel est le constat. Cependant que nous ne savons pas traiter le stockage des déchets nucléaires: enfouissement, stockage souterrain (les habitants de BURE apprécieront), désactivation, aucune solution n'est viable car "l'espérance de vie" des déchets dépasse ce que l'on peut imaginer, à savoir des dizaines de milliers d'années! Et tant pis pour l'héritage laissé aux générations futures!

    Réveillons-nous, réagissons!

    NB: le ministre Allemand de l'environnement vient de confirmer la sortie du nucléaire et, un brin ironique, annonce que le l'électricité coûte MOINS CHER en Allemagne qu'en France!

     


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  • Courant du mois de mars, le CANADA a relancé la chasse aux bébés phoques (phoque du Groenland): 345000 blanchons -c'est ainsi qu'on appelle les bébés phoques- sont d'ores et déjà condamnés dans l'Est Canadien, pour la seule satisfaction de quelques uns!

    En effets, ces bébés phoques ne réprésentent pas une source de nourriture, ni même une ressource financière (les consommateurs se sont depuis longtemps éloignés des vêtements en peau de phoque).

    Non, le crime dont les PECHEURS Canadiens accusent les phoques est d'être un soit-disant CONCURRENT: en effet ce mammifère marin vit dans l'océan!!! et se nourrit de poissons!!! Inadmissible...

    En clair, l'homme accuse la nature qui le nourrit d'être en même temps un concurrent!

    Ceci est un faux débat: c'est la SUREXPLOITATION DES OCEANS, la SURPECHE et la DESTRUCTION DES ECOSYSTEMES par des techniques de pêches d'un autre âge (chaluts pélagiques, filets dérivants, maillage trop large) qui déciment les stocks de poissons, et non pas les phoques.

    S'attaquer aux phoques, source quasi exclusive de nourriture pour l'OURS POLAIRE (ursus maritimus), c'est aussi mettre en péril ce magnifique prédateur qui n'avait pas besoin de cela.

    Car le RECHAUFFEMENT CLIMATIQUE fait sentir son effet dans l'Arctique plus qu'ailleurs: la banquise estivale régresse, et elle se forme avec quelques semaines de retard en automne, condamnant les ours polaires à rester sur la terre ferme. La compétition s'installe entre les mâles adultes, le jeûne forcé les rend agressifs envers les oursons et bien sûr ils errent dans les villages du Grand Nord à la recherche de nourriture.

    A CHURCHILL sur l'ouest de la Baie d'Hudson, le problème est réel et la police municipale a installé une "prison" pour ours afin de les garder sous contrôle entre la fin de l'été et l'arrivée de la banquise.

    Pour faire entendre raison au CANADA, une organisation environnementale "SEASHEPHERD" (les bergers de la mer, c'est joli, non?) organise une campagne de BOYCOTTAGE DES PRODUITS CANADIENS. Paul WATSON a même appelé à le rescousse une vieille connaissance (voir photo des années 70).

    Le boycottage me paraît être un des moyens de protester et j'encourage chacun à suivre cette voie, ainsi qu'à consulter le site des SEASHEPHERDS (voir les liens). Parmi les produits de la mer canadiens on trouve le saumon en conserve, fumé, frais, les crevettes, le homard, les poissons surgelés.

    Envoyez votre pétition à l'Ambassade du Canada en France en passant par l'association: secrétariat@france-canada.info (l'ambassade n'a pas d'adresse e-mail...)

    M. l'Ambassadeur du Canada: HALTE AU MASSACRE DES BEBES PHOQUES!

    Faites circuler l'information, d'avance merci pour eux! Si vous avez d'autres idées, n'hésitez pas à me contacter. 


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  • JOE est un ami canadien. Natif de l'Ontario, il a passé sa vie dans le bush (dit-il en anglais), dans le bois lorsqu'il parle français!

    Bûcheron de métier, il a fait partie de ces équipes qui ont déboisé l'ouest canadien à raison de 300 arbres par jour et par bûcheron! Heureusement qu'ils ont reforesté depuis: lorsque vous circuler sur le highway, vous voyer des panneaux: forêt récoltée en 1950, replantée en 1955, prochaine récolte prévue en 2025 par exemple.

    Aujourd'hui à la retraite, proche de ses 70 printemps, JOE vit dans sa "cabin" en bois, sans électricité ni téléphone, ni eau courante, ni fuel, pas même un groupe électrogène. Le pick-up DODGE dépasse les 40 ans et ne circule plus que sur les chemins forestiers.

    Qu'à cela ne tienne, ici il faut un bateau hors-bord et une moto-neige, c'est là son seul "luxe"! 

    Ici la nature est généreuse et offre tout à portée de main: le lac est devant la porte, la forêt l'entoure, les truites sont présentes toute l'année et les saumons remontent par centaines de milliers dès le mois de mai, après la débacle de la Nass River et le dégel de Meziadin Lake.

    JOE est donc un TRAPPEUR (le dernier?)! Un vrai, pas très moderne, pas vraiment à l'aise en ville où il se rend une fois par mois pour encaisser sa petite retraite et faire la fête avec ses amis.

    Avant de l'interroger sur son métier, sur la nature qui l'entoure, il faut gagner sa confiance,  car dans le Grand Nord on a appris la prudence, on ne se livre pas comme çà! Trop de "strangers" se sont perdus par ici...La patience est une vertue essentielle pour qui veut découvrir la Nature, et JOE est Nature, il fait partie de cette forêt boréale au même titre que les ours et les loups qui l'entourent.

    Mais une fois la glace rompue, vous pouvez l'interroger sur tout ce qui vous intéresse, il se montrera intarissable, de bon conseil et toujours prêt à vous inviter pour partager son expérience.

    En mars dernier nous avons ainsi passé deux jours en forêt. La température était agréable (-6°C), un beau soleil se reflétait sur une neige qui crissait sous nos raquettes. Car sans les "snowshoes" aucune chance de progresser dans le "bush". Contrairement aux élans d'ailleurs, qui malgré leur poids (+700kg pour un grand mâle) se montrent parfaitement mobiles avec des sabots qui leur permettent de se maintenir sur le manteau neigeux et de le gratter pour accéder à de la nourriture.

    JOE utilise des pièges classiques pour capturer essentiellement des martres et des castors. Parfois un loup se fait prendre, attiré par un morceau de castor faisandé. Mais cela est très rare, car chassé depuis des siècles, jusqu'à extermination dans les régions d'élevage, le LOUP est extrêmement prudent. JOE m'expliquait que le meilleur appât était du castor mariné pendant quelques années dans un vieux fût à essence, bonjour l'odeur, mais il paraît que les loups n'y résistent pas.

    Je me souviens de mon premier loup sauvage, que j'ai rencontré sur le highway entre...chien et loup: nous remontions de Terrace vers le Nord et Meziadin Junction, lorsqu'il traversa la route devant nous: oh ce fut une rencontre très furtive, mais sa haute silhouette et ses yeux en amande restent gravés dans ma mémoire.

    Plus tard, ce fut sur la berge de Meziadin Lake que nous avons fait l'expérience de la meute: après une journée de pêche au saumon et de sorties en canoe, le feu alimenté de cèdre rouge crépite et les filets de saumon redonnent l'énergie pour le lendemain. Une pluie d'automne nous fit préférer le DODGE à la tente pour passer la nuit au sec. Vers 2 heures du matin, nous fûmes réveillés par le hurlement des loups qui entouraient le véhicule; j'en ai encore des frissons dans le dos, non pas de peur, car le loup n'attaque pas l'homme, mais des frissons de bonheur, ce bonheur simple que seule une Nature vierge et sauvage peut vous offrir.

    Le lendemain nous rendions visite à JOE  et nous lui racontâmes notre rencontre nocturne. Il nous expliqua la vie organisée d'une meute avec la louve alpha, le mâle reproducteur et enfin les autres membres (jusqu'à 15) indispensables pour chasser l'élan et subvenir ainsi aux besoins en nourriture du groupe.

    CLAUDE et LORAINE sont trappeurs dans le YUKON, sur un territoire qu'ils arpentent depuis plus de 40 ans, et eux aussi nous racontent leurs expériences avec les loups: ils les ont observés maintes fois chasser en meute, poursuivant un ELAN ou un CARIBOU jusqu'à épuisement, avant de l'achever et le partager selon un rituel immuable. La femelle alpha et le mâle reproducteur se servent en premier, ensuite les autres membres ont accès à la carcasse. Finalement, ce sont les renards, corbeaux et aigles immatures qui se partageront les reliefs du festin et bientôt seule une tache rouge sang sur la neige marquera ce lieu où s'achève et commence le cycle pérpétuel de la Vie, car la mort donne la vie, la vie donne la mort.

    RON est une autre de mes connaissances. Trappeurs depuis des générations dans l'Ontario, lui a fait le choix de quitter l'est pour rejoindre le Nord de la Colombie Britannique, moins exploité, plus rémunérateur donc. Car RON vit de chasse, de trappe et de cueillette de champignons et de baies. 

    Une bonne ligne de trappe est construite de manière à être accessible et de pouvoir relever les pièges par tout temps, même lorsque la neige aura recouvert la forêt boréale de son manteau immaculé. C'est ainsi qu'il met à profit l'été pour débroussailler, élaguer, baliser avec des rubans de couleurs différentes ses lignes, son territoire, qu'il ne partage avec personne. Car les trappeurs ont  un code éthique qui veut que chacun respecte le territoire de l'autre, tiens, comme les loups par exemple.

    A l'automne il sillonne les grandes étendues à pieds et en canoe pour ramasser les champigons (exportés au Japon depuis Vancouver!) et en profite pour préparer ses caches d'appâts et de carburant (eh oui, la moto-neige consomme).

    Dès les premières neiges l'excitation le prend  et il quitte son camp à l'aube c'est à dire en pleine nuit, à bord de sa "snowmachine" pour rejoindre son territoire de trappe.

     

    Suite prochainement...

     


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