• Mon ami Claude, un canadien de Terrace en Colombie Britannique, m'a parlé hier d'une belle histoire  d'ours que je m'empresse de vous relater ici.

    Tout commence en 2002, sur le highway qui mène de Quesnel à Barkerville, dans les Cariboo Mountains dans le nord de la Colombie Britannique. Je connais bien le coin pour avoir visité l'écomusée de Barkerville qui retrace la ruée vers l'or de 1860. Ce lieu riche en histoire(s) vaut le détour: cabanes et lieux publics (bar, église, forgeron, théâtre...) furent restaurés au fil des ans et des acteurs de théatre animent le village à la belle saison. Une vraie machine à remonter le temps qui me fait revivre une époque que j'aurais aimé connaître!

    Sur le highway donc en 2002, un braconnier tue une ourse, dans l'illégalité la plus complète, se fait prendre et est condamné à 9000$ canadiens d'amende, avec retrait à vie du port d'arme et confisquation de ses armes. La sanction fut d'autant plus dure que l'ourse laisse derrière elle deux orphelins.

    BOO (c'est le nom qui lui fut donné) et son frère se retrouvent donc dans un "orphelinat" pour oursons, soignés par des gardes attentionnés et dévoués. L'enclos qu'ils partagent avec d'autres copains est spacieux, mais il manque l'essentiel: la LIBERTE. L'hiver 2004 fut fatal au petit frère de BOO qui ne se réveillera pas de son hibernation.

    BOO a pourtant gardé sa joie de vivre et voilà qu'arrive l'âge adulte et les pulsions qui l'accompagnent. Oh, pas qu'il se montre ingrat envers ceux qui l'ont sauvé, non. Simplement il veut vivre une vraie vie d'ours, avec les filles et tout et tout. Par une belle après-midi de ce début juin, arrive l'occasion rêvée: une belle femelle, en âge de se laisser courtiser, longe la clôture de l'enclos...mais à l'extérieur!

    Qu'à cela ne tienne, BOO réunit toute son énergie pour creuser un passage sous la clôture en moins de temps qu'il ne faut aux gardes pour s'en rendre compte! A lui la liberté, à lui les premières joies de la vie sans contraintes, une vrai vie d'ours, et avec çà à deux! Car sa nouvelle compagne l'a accepté, et les voilà partis en goguette à travers la forêt du côté de Kiking Horse (le cheval qui botte, joli nom pour un village, non?).

    Evidemment son escapade suscite l'émoi auprès des gardes, l'intérêt du public mais aussi l'inquiétude des autorités qui se sentent particulièrement responsables de la sécurité des habitants du coin. Et voilà pour la première fois (à ma connaissance) que dans l'histoire du Canada les ébats amoureux de deux  GRIZZLIS sont surveillés...par hélicoptère! Car les grands moyens furent déployés pour garder la trace de BOO qui ne se laisse pas détourner de son objectif, de ce que la Nature lui dicte: se reproduire. Conscient de la situation, les autorités ont décidé de laisser à BOO le temps nécessaire: entre les préliminaires et l'accouplement, il faut bien trois semaines, parole de grizzly!

    Ce que BOO n'appréhende pas (mais après tout il n'a pas à le faire, il est chez lui), c'est que cette liberté conditionnelle risque de se terminer s'il devait s'approcher des habitations: en effet les gardes le croient trop familier avec l'humain et donc en danger face à des personnes peu habituées aux rencontres avec les plantigrades et donc prêtes à tirer sans sommations.

    Souhaitons à BOO et à sa compagne de bien profiter de ce printemps en liberté et d'éviter les hommes qui malheureusement mettraient aussitôt fin à leur escapade. S'ils passent l'été, les esprits se seront calmés et gageons qu'en automne plus personne ne pensera à l'incarcérer!

     


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